L'un des principaux initiateurs du Firefly est le Major Witheridge qui arrive en juin 1943 à la Gunnery School de Lulworth. Ancien spécialiste en armement d'avant-guerre, il a combattu sur M3 Grant en Afrique du Nord avant d'être muté à la Tank Gunnery School du Moyen-Orient. Il passe finalement 1 an aux Etats-Unis, attaché à l'Armored Force Board de Fort Knox, où il apprend à apprécier les qualités du Sherman tout en déplorant son armement insuffisant. A son arrivée à Lulworth, le Department of Tank Design travaille depuis quelque temps déjà sur le Challenger, censé accueillir le canon de 17 pounder, mais Witheridge n'en approuve pas le concept. Rapidement, il fait équipe avec le Major Brighty qui étudie déjà la possibilité d'adapter ce volumineux canon dans la tourelle d'un Sherman et axe son travail sur le fort recul de la pièce. Dans sa version tractée, cette dernière possède deux importants cylindres de recul positionnés au dessus et au dessous d'elle. Cette disposition n'a pas été changée sur le Challenger et c'est clairement ce qui explique la hauteur importante de sa tourelle.
La place est bien plus limitée dans la tourelle d'un Sherman, et la puissance du canon, avec une vitesse initiale de 1000 m/s pour un obus de 8 kg, impose de très bien maitriser le recul. Le Major Brighty commence par tester la résistance du châssis seul du Sherman. Pour ce faire, il fixe un canon de 17 pounder directement sur le bouclier, sans aucun système de recul, laissant seul le char absorber le choc du départ de coup. L'engin résiste mais cette solution n'est absolument pas viable sur la durée. Des dommages sont prévisibles sur les soudures, les boulonnages et surtout l'anneau de tourelle et les organes de visée. C'est à ce moment là que le Department of Tank Design ordonne l'arrêt du projet, considérant qu'il est irréalisable. C'est au tour du Major Witheridge d'agir. Il contacte le General Briggs, directeur du Royal Armored Corps, dont l'intervention permet de confier une étude sur la faisabilité du projet à un ingénieur de chez Vickers, un certain Kilbourn. Ce dernier rédige un rapport favorable qui relance l'étude du Firefly.
Les problèmes posés par le recul subsistant, l'ingénieur imagine puis conçoit deux prototypes de cylindres plus compacts, placés l'un en haut à droite, et l'autre en bas à gauche de la culasse. C'est un succès ! Cependant, l'affut d'origine est encore beaucoup trop long et, pour le raccourcir, il convient de modifier la jonction entre la culasse et le tube. La forme de cette pièce rend l'adaptation difficile mais elle est réalisée là aussi avec succès. Le nouveau canon Ordnance Quick Firing 17-Pdr MkIV peut enfin être testé dans une tourelle de Sherman le 26 décembre 1943, à l'arsenal de Woolwich, à Londres.
Ce canon long de 55 calibres offre un punch inédit pour un char allié. Capable de percer 115 mm d'acier à 1000 m avec un obus perforant standard, et encore 95 mm à 1500 m, le 17 pounder équilibre les forces avec les panzers lourds. Si l'objectif est plus loin, le 17 pounder dispose encore d'obus à coiffe capables de percer 108 mm à 1500 m et encore 99 mm à 2000 m. Enfin, en dernier recours, il dispose d'obus à sabot à très haute vitesse initiale, toutefois en faible dotation,. Cet obus atteint une vitesse à la sortie du frein de bouche de 1284 m/s et transperce 151 mm à 2000 m et 204 mm à 500 m. Les Tiger et Panther ne sont plus à l'abri à longue distance.
Le futur Firefly vient à point, car on trouve la trace de demandes officielles pour un Sherman armé d'un canon de 17 pounder dès septembre 1943. L'appui de Winston Churchill est également décisif. Lorsqu'il apprend la réussite des essais, le Premier ministre britannique, passionné des armes nouvelles, donne toute priorité pour la réalisation rapide des conversions nécessaires.