Au fil de son déploiement au sein des unités mécanisées américaines, le M60A2 est surnommé «Starship», en référence à son haut degré de savoir-faire, digne de l’ère spatiale. Dans la bouche des tankistes, ce surnom est toutefois loin d’être positif. Les nouveaux instruments manquent de maturité, au point qu’ils n’ont pas le niveau de fiabilité nécessaire pour assurer un taux de disponibilité correct.
En parallèle à ces soucis de jeunesse, il apparaît que les performances du MGM Ford-51 sont moins bonnes que prévu. Surtout avec l’arrivée du canon britannique L7 de 105 mm au capacités antichars très élevées. Devant un tel concurrent, le Shillelagh présente de nombreux désavantages. Sa faible vitesse initiale est un lourd handicap face à un projectile tiré par un canon long. Il est vrai que plus le parcours est long, plus le temps de vol est important. Un laps de temps pendant lequel le char doit rester immobile afin que le tireur puisse diriger le missile. Le M60A2 se transforme ainsi en une cible facile pour les pointeurs ennemis.
De plus, les portées théoriques, 1500 m avec l’obus de 152 mm et 3000 m avec le missile, ont été surestimées par les ingénieurs. Dans la pratique, les cônes d’engagement chutent à moins de 2 km et la précision demeure inférieure à celle d’un tube de 105 mm. A cela, il faut ajouter que, contrairement à une pièce d’artillerie qui ouvre le feu à bout portant, le missile n’a pas la capacité de toucher un objectif à moins de 730 m. Un espace qui s’apparente à une «dead range» pour ses équipages. Le lancement mixte de 152 mm est de ce fait largement en dessous des performances affichées par les munitions normales de 105 mm.
La taille du Shillelagh ne permet pas, en plus, d’en embarquer plus de 13, une dotation qui l’oblige à ravitailler fréquemment. Le temps d’occupation du terrain se révèle ainsi inférieur aux blindés classiques. Pour couronner le tout, le MGM Ford-51 Shillelagh impose des contraintes plus importantes en comparaison d’un obus. Il se montre fragile dans le temps et sa durée de vie est donc inférieure à une cartouche de 105 mm. Par ailleurs, il encaisse moins bien les chocs que cette dernière. Enfin, sa taille conséquente gène la manutention dans l’espace restreint de la tourelle, accentuant la fatigue du chargeur et réduisant d’autant la cadence de tir.
Tactiquement inférieur à ses homologues occidentaux de l’époque, le char de la «Guerre des étoiles» voit sa fabrication stoppée en 1975 avec seulement 526 exemplaires construits. Les États-Unis tentent bien de fiabiliser le M60A2, avec un certain succès concernant les problèmes de jeunesse, mais le «Starship» n’est toujours pas apte au combat. Finalement, dans les années 1980, les tourelles partent à la casse, tandis que les caisses sont converties en M60A3 dotés de canons de 105 M68, ou en véhicules poseurs de pont.